Enquête indépendante sur l'événement survenu à Québec le 25 août 2019 : motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée
QUÉBEC, le 19 avril 2022 /CNW Telbec/ - Les procédures judiciaires étant terminées, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) expose les motifs l'ayant mené à ne pas déposer d'accusation dans ce dossier.
Rappelons qu'il concluait, dans son communiqué intérimaire du 9 décembre 2020, que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ). Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec l'événement entourant les blessures subies par un homme à Québec le 25 août 2019.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI avait été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier avait procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révélait la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée de la décision.
Le 25 août 2019, deux agents du SPVQ, à bord d'un véhicule de patrouille, tentent d'intercepter une moto conduite par un homme ayant commis des infractions au Code de la sécurité routière. Un passager prend également place sur la moto.
Or, plutôt que d'obtempérer et de s'arrêter, le conducteur décide de prendre la fuite. Il s'en suit une courte poursuite policière durant laquelle l'homme multiplie les manœuvres dangereuses. De son côté, le véhicule de patrouille a ses gyrophares et la sirène en fonction à ce moment.
La poursuite se déroule sur environ 635 mètres pour une durée d'environ 2 minutes et se solde par une perte de contrôle du conducteur de la moto.
Selon la preuve au dossier, les agents du SPVQ n'ont pas causé l'accident; leur véhicule n'est pas entré en collision avec la moto et se trouvait à plusieurs secondes derrière la moto lors de la poursuite.
À la suite de cet accident, le conducteur laisse sa moto au sol et tente de prendre la fuite à pied. Il est finalement rattrapé et arrêté.
Il y a également lieu de préciser que le passager de la moto est blessé sérieusement lors de l'accident; il est cependant pris en charge rapidement.
L'infraction de conduite dangereuse, décrite à l'article 320.13 du Code criminel se définit comme le fait de conduire un véhicule à moteur d'une façon dangereuse pour le public, en tenant compte des circonstances, incluant l'utilisation qui en est faite, la nature et l'état du lieu ainsi que l'intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu. Le test applicable en matière de conduite dangereuse a été établi par la Cour suprême et prévoit que la preuve doit démontrer que la façon de conduire était objectivement dangereuse pour le public. À cet égard, c'est le risque de dommage ou de préjudice créé par la conduite qui doit être évalué, indépendamment des conséquences d'un accident survenu à l'occasion de la conduite du véhicule.
La preuve doit également établir que la conduite objectivement dangereuse adoptée par le conducteur constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les mêmes circonstances. Le critère de l'écart marqué souligne le haut degré de négligence nécessaire pour engager la responsabilité criminelle. Ainsi, une imprudence, une simple négligence ou une erreur de jugement sont insuffisantes pour engager la responsabilité criminelle d'un individu.
Par ailleurs, le Code de la sécurité routière (ci-après le « Code ») contient certaines dispositions relatives à la conduite d'un véhicule d'urgence. L'article 378 précise que le conducteur d'un véhicule d'urgence ne doit actionner les feux clignotants ou pivotants ou les avertisseurs sonores ou un dispositif de changement des signaux lumineux de circulation visés à l'article 255 dont est muni son véhicule, que dans l'exercice de ses fonctions et si les circonstances l'exigent. Il n'est alors pas tenu de respecter certaines dispositions du Code.
Dans ce dossier, l'agent du SPVQ qui conduisait le véhicule de patrouille n'a pas conduit d'une façon dangereuse eu égard à l'ensemble des circonstances. Les motifs de l'interception étaient justifiés, la poursuite a été de très courte durée et le véhicule de patrouille n'est pas entré en collision avec la moto. Ce dernier suivait d'ailleurs de plusieurs secondes la moto du conducteur en fuite au moment de sa perte de contrôle.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du SPVQ impliqués dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, quebec.ca/gouv/dpcp
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