Enquête indépendante sur l'événement survenu à Québec le 6 mai 2023 : le DPCP ne portera pas d'accusation
QUÉBEC , le 22 avril 2024 /CNW/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ).
L'analyse portait sur l'événement entourant les blessures subies par un homme à Québec le 6 mai 2023.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier a procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée de la décision.
Vers 15 h 05, à la suite d'un signalement au 911, des ambulanciers arrivent au domicile d'un homme. Ce dernier est suicidaire et armé d'un couteau. Les ambulanciers se replient à l'extérieur et demandent en urgence l'assistance des policiers.
Vers 15 h 15, un policier arrive sur les lieux. L'homme en détresse est seul à l'intérieur, assis dans un fauteuil roulant situé au salon. Il appuie un couteau sur sa gorge tailladée. Le policier tente en vain d'engager une conversation avec l'homme. Il se replie à l'extérieur et sollicite la présence de collègues équipés d'armes à impulsion électrique (AIE) et de boucliers inversés.
Vers 15 h 26, deux policiers munis d'AEI et deux policiers pourvus de boucliers inversés sont positionnés devant des portes coulissantes entrouvertes. Celles-ci mènent au salon où se trouve l'homme. À partir de ce moment, un de ces policiers demande continuellement à l'homme de se départir du couteau et l'invite à recevoir des soins médicaux. L'homme ne collabore pas. Ses propos sont décousus et répétitifs. À plusieurs reprises, il affirme vouloir mettre fin à ses jours. Il se blesse mainte fois à la gorge en y enfonçant la lame du couteau. Il n'agit pas de manière agressive envers les policiers, mais refuse d'obtempérer à leurs demandes durant presque une heure.
Vers 16 h 13, après s'être déplacé de son fauteuil roulant jusqu'à un divan, l'homme dépose soudainement son couteau et se redresse. Un policier décide alors d'utiliser son AIE en déployant deux cartouches. L'homme, qui est à environ trois mètres, est atteint à la cuisse et à la poitrine. Un premier cycle de décharge de cinq secondes, puis un second cycle de sept secondes sont employés afin de le neutraliser. Lorsque l'homme s'affaisse, les policiers se précipitent dans le salon afin de le contrôler.
L'homme redevient vite actif. Il crache du sang et se débat. Les policiers parviennent à le maîtriser. Ils le menottent sur une planche dorsale, ce qui permet l'octroi des premiers soins. L'homme est ensuite transporté à l'hôpital où il subit des interventions chirurgicales au cou. Il survit finalement aux blessures qu'il s'est infligées lors de l'intervention policière.
L'article 48 de la Loi sur la police prévoit que les policiers ont pour mission de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime.
Dans la présente affaire, l'intervention était légale. Elle visait à assurer la sécurité de l'homme qui tenait des propos suicidaires. De plus, le comportement de ce dernier représentait un risque pour la sécurité des premiers répondants.
Le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25(1) du Code criminel sont remplies.
L'article 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
La preuve révèle que l'utilisation de l'AEI et les manœuvres employées afin de maîtriser l'homme étaient nécessaires, proportionnelles et raisonnables dans les circonstances. La force employée était modérée et l'objectif était de maîtriser l'homme afin qu'il ne puisse pas se blesser davantage et que des soins médicaux lui soient prodigués.
Conséquemment, à la suite de son analyse, le DPCP est d'avis que la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du SPVQ dans cet événement.
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085, [email protected]
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