Le DPCP annonce qu'il ne portera pas d'accusation dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 3 avril 2018 à Umiujaq, lors duquel une femme a été blessée
QUÉBEC, le 26 sept. 2019 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec les blessures subies par une femme le 3 avril 2018 à Umiujaq, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne révèle pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers du Corps de police régional Kativik (CPRK).
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été confié à un comité composé de deux procureurs aux poursuites criminelles et pénales (procureurs). Ces derniers ont procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles. Un procureur qui a participé à l'analyse du dossier a informé des proches de la personne blessée des motifs de la décision.
Événement
Le 3 avril 2018, vers 16 h 50, un appel téléphonique est fait au poste de police d'Umiujaq. Un policier répond et une femme s'identifie en lui mentionnant qu'elle se trouve à la garderie armée d'un couteau et qu'elle veut blesser quelqu'un. Elle raccroche ensuite.
Le policier et un collègue quittent le poste à bord d'un véhicule de patrouille afin de se rendre à la garderie. En route, ils aperçoivent la femme dans la rue. Celle-ci tient dans sa main droite un couteau appuyé contre sa gorge. Lorsqu'elle voit le véhicule de patrouille, elle se met à courir vers une maison d'habitation située à proximité.
Estimant qu'il n'a pas le temps de descendre du véhicule de patrouille pour intercepter la femme avant qu'elle n'entre dans la maison, le policier au volant du véhicule accélère pour l'empêcher de se rendre à la maison. En approchant de la femme, le policier tente de ralentir en freinant. La chaussée étant glacée, le véhicule de patrouille glisse et heurte la dame, à une vitesse estimée entre 20 et 30 km/h. Celle-ci se retrouve coincée entre la roue droite et un amoncellement de neige.
Les premiers répondants sont appelés et la femme est transportée au dispensaire d'Umiujaq. Elle est ensuite évacuée par avion à un centre hospitalier de Montréal en raison de son état de santé.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les agents de la paix sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Dans ce dossier, l'intervention des policiers était légale et découlait de l'appel téléphonique fait au poste de police par la femme, qui prétendait être armée d'un couteau, se trouver à la garderie et vouloir faire du mal à quelqu'un.
Considérant la menace proférée par la femme au téléphone, le fait qu'elle était armée d'un couteau et se dirigeait en courant vers une maison d'habitation, ainsi que la distance séparant la femme et les policiers, le policier qui conduisait le véhicule avait des motifs raisonnables d'estimer que l'utilisation du véhicule de patrouille afin d'empêcher la femme d'entrer dans la maison était nécessaire afin de protéger ses occupants contre des lésions corporelles graves ou la mort.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d'un acte criminel par les policiers du CPRK impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Jean Pascal Boucher, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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