QUÉBEC, le 21 mars 2018 /CNW Telbec/ - Après examen du rapport d'enquête produit par le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) à la suite du décès d'un cycliste, survenu à Montréal le 4 octobre 2017 sur le chemin Camillien-Houde, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) conclut ne pas être raisonnablement convaincu d'être en mesure d'établir la culpabilité du conducteur. En conséquence, aucune accusation criminelle ne sera déposée dans ce dossier.
Avant de rendre publique cette décision, les proches de la personne décédée ont été rencontrés afin de les informer du résultat de l'analyse du dossier et de leur expliquer les motifs qui sous-tendent cette décision.
Critères à l'origine de la décision de poursuivre
En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal. En s'appuyant sur une analyse rigoureuse du rapport d'enquête, le procureur doit donc être raisonnablement convaincu de pouvoir établir la culpabilité du prévenu. La norme qui guide le procureur concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3 du DPCP.
Événement du 4 octobre 2017
Le 4 octobre 2017 vers 10 h 50, un véhicule Toyota Highlander en provenance du belvédère du Mont-Royal circule en direction nord sur le chemin Camillien-Houde. Alors que le véhicule sort d'une courbe, à l'endroit où un muret de béton cesse de séparer la chaussée et où débute une ligne jaune double continue, le conducteur entreprend d'effectuer un virage en « U ».
À cet endroit, il y a une voie de circulation dans chaque direction ainsi qu'une voie d'accotement de part et d'autre. Au moment où le conducteur entreprend sa manœuvre, un cycliste descend la pente également en direction nord. Alors que le véhicule se trouve en position perpendiculaire à la route, le cycliste heurte de plein fouet la porte arrière gauche du Toyota Highlander. Son décès sera constaté à l'hôpital en soirée.
Dans ce dossier, la preuve est fondée principalement sur les analyses de l'expert en reconstitution de scènes de collisions, sur la trace de freinage du vélo, sur les déclarations des témoins et sur les déclarations non contredites du conducteur, car aucune caméra n'est installée sur le chemin Camillien-Houde. Ainsi, le conducteur affirme avoir regardé dans ses miroirs avant d'entreprendre la manœuvre et n'y avoir vu aucun véhicule ou vélo. Cette déclaration est appuyée par un passager qui prenait place dans le véhicule. La vraisemblance de cette hypothèse est confirmée par l'expert du SPVM. Ce dernier atteste également que la vitesse du véhicule Toyota n'est pas en cause dans cette affaire, bien que l'analyse de la scène de l'accident n'ait pas permis d'établir la vitesse à laquelle circulaient le cycliste et le véhicule Toyota au moment de la collision. L'expert conclut que le cycliste a manqué de temps et de distance pour être en mesure d'éviter la collision.
Opinion du DPCP
L'infraction de conduite dangereuse, décrite à l'article 249 du Code criminel, se définit comme le fait de conduire un véhicule à moteur d'une façon dangereuse pour le public, en tenant compte des circonstances, incluant l'utilisation qui en est faite, la nature et l'état du lieu ainsi que l'intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu. Le test applicable en matière de conduite dangereuse a été établi par la Cour suprême et prévoit que la preuve doit démontrer que la façon de conduire était objectivement dangereuse pour le public. À cet égard, c'est le risque de dommage ou de préjudice créé par la conduite qui doit être évalué, indépendamment des conséquences d'un accident survenu à l'occasion de la conduite du véhicule. La preuve doit également établir que la conduite objectivement dangereuse adoptée par le conducteur constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les mêmes circonstances. Le critère de l'écart marqué souligne le haut degré de négligence nécessaire pour engager la responsabilité criminelle. Ainsi, une imprudence, une simple négligence ou une erreur de jugement sont insuffisantes pour engager la responsabilité criminelle d'un individu.
Dans le présent dossier, l'analyse du rapport d'enquête ainsi que le droit applicable ne permettent pas de conclure que cette manœuvre constituait un écart marqué par rapport à une personne raisonnable dans les mêmes circonstances.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
L'institution a adopté en 2015 des lignes directrices qui autorisent et encadrent la publication des motifs qui étayent sa décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers. La publication de ces motifs est exceptionnelle et repose sur des considérations de nature juridique ainsi que sur le respect de la vie privée et de la réputation des victimes et des personnes qui font l'objet d'une enquête lorsque la preuve est insuffisante pour permettre le dépôt d'accusations criminelles.
Pour en savoir davantage sur le DPCP et sur les lignes directrices :
www.dpcp.gouv.qc.ca
www.dpcp.gouv.qc.ca/ressources/pdf/Lignes_directrices.pdf
Source :
Me Jean Pascal Boucher
Porte-parole
Directeur des poursuites criminelles et pénales
418 643-4085
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Jean Pascal Boucher, Porte-parole, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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