Le DPCP expose les motifs pour lesquels aucune accusation n'a été portée dans le dossier de l'enquête indépendante instituée à la suite de l'événement survenu le 7 décembre 2018 à Thetford Mines lors duquel un homme a été blessé
QUÉBEC, le 1er oct. 2021 /CNW Telbec/ - Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) annonçait dans son communiqué intérimaire du 23 juin 2020 qu'il concluait que l'analyse de la preuve ne révélait pas la commission d'une infraction criminelle par les policiers de la Sûreté du Québec (SQ). Cette décision faisait suite à l'examen du rapport produit par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) en lien avec les blessures subies par un homme le 7 décembre 2018 à Thetford Mines.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI avait été confié à un procureur aux poursuites criminelles et pénales (procureur). Ce dernier avait procédé à un examen complet de la preuve afin d'évaluer si celle-ci révélait la commission d'infractions criminelles. Le procureur a informé la personne blessée de la décision.
Les procédures juridiques étant terminées, voici les motifs ayant mené le DPCP à ne pas déposer d'accusation dans ce dossier.
Événement
Le 7 décembre 2018, vers 3 h du matin, un appel est fait au 911 par une dame concernant une agression au couteau dans une résidence de Thetford Mines. Deux agents de la Sûreté municipale de Thetford Mines se rendent sur place et sont en mesure de s'occuper d'abord des blessés. Puis, un homme refuse de se rendre et prend refuge sur le balcon situé au deuxième étage de l'immeuble. Des négociations sont entreprises par les policiers de Thetford Mines, puis le Groupe tactique d'intervention (GTI) de la SQ prend la relève.
L'homme menace de se poignarder à la poitrine en prenant appui dans un cadre de porte. Pendant près de deux heures, les policiers de la SQ tentent de convaincre l'individu de lâcher le couteau. Sa verbalisation à l'effet qu'il allait passer à l'acte force les policiers à utiliser une arme intermédiaire pour mettre fin à la menace. Qui plus est, l'homme a eu le temps de s'infliger une blessure grave par arme blanche.
L'homme blessé est transporté par ambulance à un centre hospitalier de la région, puis transféré à un second situé dans un grand centre.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les conditions énumérées à l'article 25 du Code criminel sont remplies.
Cette disposition accorde une protection à l'agent de la paix qui emploie la force dans le cadre de l'application ou de l'exécution de la loi.
Le paragraphe 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour elle-même ou pour autrui.
Le paragraphe 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force appliquée avec précision.
Dans ce dossier, l'intervention était légale et les autres choix étaient très limités, voire inexistants, dans les circonstances. À la suite de négociations ayant duré plusieurs heures, l'homme en est venu à s'infliger lui-même des blessures sérieuses. En pratique, rien d'autre que l'usage de l'arme intermédiaire ne pouvait être tenté pour empêcher l'homme de se blesser davantage. Dans les faits, l'enquête ne démontre pas que l'homme a été atteint par l'un des projectiles de plastique 37 mm tirés par l'agent du GTI. Les policiers avaient des motifs raisonnables d'estimer que la force appliquée à l'endroit de l'homme était nécessaire pour la protection de ce dernier contre des lésions corporelles plus graves que celles susceptibles d'être infligées par les projectiles tirés ou la mort. Enfin, on ne peut conclure que les blessures subies par l'homme résultent d'un tir de l'arme intermédiaire employée en l'espèce.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force par les agents de la paix était justifié en vertu de l'article 25 du Code criminel. L'analyse de la preuve ne révèle pas à son avis la commission d'un acte criminel par les policiers de la SQ impliqués dans cet événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des recommandations concernant les méthodes d'intervention policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales
Me Patricia Johnson, Porte-parole adjointe, Directeur des poursuites criminelles et pénales, 418 643-4085
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